Exposition de Elsa Moscato

Exposition de Elsa Moscato

Exposition de peinture "symbiose" de Elsa Moscato à Saint-Denis

Exposition de peinture "symbiose", bestiaire parfois au clin d'oeil à la faune locale, avec 1 regard sociétal, à La Médiathèque François Mitterrand de Saint-Denis / leur grande salle d'exposition, tout le mois de mai 2024

A propos de l'exposition 

Ô Spectatrice, Spectateur, si après un arrêt entre deux livres à déposer, tu repars de cette exposition avec le sourire, sache que je serais ravie. Mais alors, te dis-tu fébrilement, pourquoi «symbiose» ? Tu as deux minutes ?

Cohabitation bénéfique, la symbiose signifie l’union entre deux entités vivantes, et ouvre les voies de l’imagi-nation à celles et à ceux qui reprendraient bien une tranche de fantaisie, surtout en arts visuels. Pourquoi un champignon amanite au-dessus d’un perroquet ? Pourquoi pas, ils ont l’air absolument ravis de cette coloca-tion. Parfois une espèce prend le pas sur une autre, comme le poisson coffre qui semble s’imposer. Mais qui te dit que le coeur du papillon, déployant ses ailes au travers du corps marin, ne bat pas en son hôte tout en l’embarquant vers un univers céleste insoupçonné ? Promis, il enverra une carte postale au baliste Picasso, réputé territorial et agressif, mais il est juste gros coeur. Ce bestiaire est ainsi une ode à l’harmonie étrange des organismes transcendés, muqueuses, griffes et truffes en tous genres. Le pouvoir inventif se matérialise comme une bête complexe, au cerveau débordant d’où peuvent sortir tentacules de pieuvre et autres aberrations.

Les apparentes appellations latines, ne sont pas à prendre au sérieux ; les titres sont bricolés à partir d’une base linguistique, comme si la panoplie du naturaliste avait été enfilée, un oeil sévère derrière le monocle. Mais trêves de Buffonnerie*, dans ce simili cabinet de curiosité effronté, je préfère largement l’illusion du vivant, aux animaux morts séchés épinglés. Par ailleurs, le choix nominal se fait aussi sur une sonorité, une déviation qui parlent au subconscient. Ces créatures absorbent ce qu’expulse l’artiste fascinée par un océan de divertissements (jouets, personnages de livre, de jeu, de film d’animation, certaines toiles puisent dans la mémoire collective), de consultations vertigineuses à portée de télécommandes, de clics au travers d’écrans nous emmenant si loin. Que dit de nous cet immense ensemble, là pour nous amuser ? Curieux, créatifs ? Phobiques de l’ennui ? Ce bestiaire, aussi composé de souvenirs émerveillés devant notre faune locale et mondiale, est une modeste digestion d’un festin de doudous, d’images, de visions qui nous dépasse complètement, avec des yeux peints qui nous fixent, nous parlent qui sait, tout en affichant un regard perdu dans une folie comprimée.

L’hybridation, voire l’asymétrie, se révèle être plus qu’une drôlerie, c’est un transfert. Tous les êtres vivants sont complexes, bien sûr l’être humain l’est, avec des émotions contradictoires dans son segment de vie spatio temporelle, malgré une apparence beaucoup plus lisse. Toi, par exemple, es-tu équilibré ? Ou jongles-tu, tel un acrobate sur le fil de l’angoisse, avec tes sourires, tes carences, tes assurances, tes rêves immodérés ? L’asy-métrie permet d’interroger un équilibre fragile : une patte faite à gauche, manquante à droite, est compensée par une aile, à l’intérieur d’une composition sophistiquée qui transforme l’animal en territoire. Difficile à expliquer, mais plus fluide à ressentir, à peindre. Et comment pourrait-il en être autrement, je suis d’ici et d’ailleurs, aux origines assez mélangées, ayant ce zarlor au coeur d’une île si inspirante et si bouleversante dans laquelle je suis née, et traversée de mille courants, famille paternelle réunionnaise, famille maternelle aux origines italiennes que je connais peu finalement... comme tellement de gens qui portent un cartable non choisi à plusieurs compartiments. Oui, mais ce que j’écrirai ou plutôt peindrai, j’en serai maitresse. Une créature respirant l’unicité, la simplicité ne m’intéresse que moyennement à accoucher en peinture car la difficulté intrinsèque, le métissage, l’identité composite sont mon langage organique.

Ah... tu croyais qu’il n’était question que de bestioles ? Il y a toujours du caché dans le montré.

Pour finir, je suis très honorée que ce travail soit accueilli à Montgaillard, le quartier de mon enfance, par la Médiathèque François Mitterrand, sur autrefois un grand terrain à l’abandon face à La Trinité, pour celles et ceux qui s’en souviennent dans les années 80. La ville a décidé depuis d’en faire un bel édifice culturel protéiforme, et ce travail pictural singulier trouve une résonance intéressante avec les livres qui restent une immense richesse pour nous tous. Et un grand merci à Emmanuelle Cheynet d’avoir complètement déliré en prose pour accompagner ce corpus.

* Georges-Louis Leclerc de Buffon est un scientifique naturaliste du XVIIIème siècle s’étant penché sur la géologie, la biologie et la zoologie.

A propos de Elsa Moscato : 

Née à La Réunion en 1977 et y vivant ses 8 premières années, Elsa Moscato passionnée d’arts étudie essentiellement en région parisienne et dans la capitale, à l’Université Paris VIII en arts plastiques, puis à l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs / ENSAD de Paris, en design mobilier. De retour sur son île natale depuis 2000, le métier de l’image la séduit à travers différents postes créatifs graphiques & directrices artistiques en agence de publicité. Sa sensibilité et son expérience mêlant l’aspect bidimensionnel et l’espace lui confèrent un profil protéiforme. Elle apporte son expérience aux travers différentes interventions pédagogiques en image et arts appliqués.

Avec un statut Artiste Auteur, Elsa Moscato tient une production picturale affichant une attirance pour un monde organique transposé, à travers de plus en plus d’expositions dont certaines impliquent des vidéos expérimentales. Animaux, créatures, personnages, complexités vivantes, tout est bon pour questionner une certaine humanité. Longue vie aux délires en arts visuels donc ! Peut-être un jour s’essayer à l’édition, à la narration livresque, se dit-elle. Parallèlement à cela, elle aime se greffer à l’art vivant, avec la participation associative au carnaval Grand Boucan (communication graphique depuis 2010, réalisation collective artistique). En 2023, elle a aussi rendu hommage à son père Jean-Philippe Rivière, journaliste et dessinateur, avec les expositions «Feuilles Songes» (Médiathèque François Mitterrand), «Poésile» (Villa Rivière). Entre fin juin et mi septembre 2024, sa candidature a été acceptée pour un espace atelier à La Cité des Arts de La Réunion.

 

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